Les wagons réservés aux femmes dans les trains 女性専用車
Women Only
Le harcèlement sexuel est tristement d'actualité dans le monde entier. Au Japon, afin de protéger les passagères des transports en commun d’éventuels attouchements, des compagnies de chemins de fer ont réservé l'accès de certains wagons à la gent féminine.
Les wagons pour femmes : une pratique ancienne
Dès 1912, la ligne Chûô de Tokyo instaura des wagons réservés aux femmes afin de séparer les étudiantes des étudiants aux heures de pointe, et ce jusqu’à ce que la seconde guerre mondiale éclate. En1920, c’est au tour de la ville de Kobe de réserver des tramways entiers à ces dames, tandis que dans les années 1930, la compagnie Hankyu proposait des trains réservés aux écolières qui voyageaient de Kobe à Nishinomiya, ville située à une quinzaine de kilomètres plus loin. Après la seconde guerre mondiale, des compagnies ferroviaires, dont la Chûô, réservèrent des wagons aux femmes et aux enfants car il leur était extrêmement difficile de monter dans les trains bondés d'hommes. Ces wagons furent remplacés en 1973 par le système des places prioritaires.
Un système pour lutter contre les satyres
Si les wagons réservés aux femmes et aux écolières ont disparu vers le milieu du XXe siècle, les voyageurs aux "mains baladeuses", eux, sont restés. Dans une enquête menée au début des années 2000 par la police métropolitaine de Tokyo et la compagnie ferroviaireJR, deux tiers des femmes âgées de 20 à 40 ans ont révélé avoir été victimes d'attouchements, chikan (terme qui désigne en même temps la personne coupable et l'acte de tripoter quelqu'un sans son consentement) dans des trains bondés. Ces résultats ont incité certaines compagnies à prendre des mesures et elles ont commencé à réserver des wagons entiers aux passagères aux heures de pointe, ou d’autres toute la journée, mais seulement en semaine. En 2000, la ligne Keio, qui relie Shinjuku aux cités dortoirs de l’Ouest de Tokyo, fut l’une des premières à proposer des wagons réservés aux dames. Elle proposa d’abord ce service pour les horaires tardifs puis le soir aux heures de pointe sur les trains express.
En 2001,JR East suivi l’exemple pour les horaires tardifs sur la ligne Saikyo, qui relie Tokyo à la préfecture de Saitama et qui était tristement réputée pour les nombreux peloteurs qui profitaient de la foule et des longues distances entre les gares pour perpétrer leurs actes malfaisants. L’année suivante, le même système était appliqué aux heures de pointe en soirée.
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À Osaka, depuis 2002, la ligne de métro Midosuji a ses wagons réservés aux dames. Transportant à certaines heures des passagers à 160% de sa capacité, cette ligne était connue comme la pire pour le problème de chikan. Le système s’étant avéré très efficace (les plaintes des victimes de mains baladeuses ayant diminué d’un tiers en un an), il a été instauré pour la journée et non pas seulement aux heures de pointe. La ligne Hankyu a elle aussi suivi l’exemple en proposant des wagons "Women only" toute la journée. En 2002, c’est au tour de la compagnie JR WEST de réserver certains wagons aux dames aux heures de pointe.
Depuis 2005, la plupart des compagnies opérant des lignes sur Tokyo ont des wagons réservés aux dames. Certaines d’entre elles autorisent l'accès à ces wagons aux garçons qui sont au primaire, aux handicapés et aux personnes s’occupant d’eux (hommes ou femmes).
Des signaux sur les quais indiquent quels sont les wagons, les jours et les heures auxquels ils sont réservés aux femmes.
Chikan : des actes punis par la loi
Le problème des chikan est pris très au sérieux par les compagnies ferroviaires et les autorités et toute personne reconnue coupable d’attouchements est passible d’une peine de prison ou d’une contravention allant jusqu’à 500 000 yen (3 700€). Des panneaux dans les gares rappellent que le "tripotage" est un crime puni par la loi. Mais comme partout dans le monde, la plupart des femmes victimes de tels actes n’osent pas réagir et, si elles le font en criant "chikan", il est parfois difficile d’arrêter le coupable qui s’enfuit avant que l’entourage ne réagisse.
Le problème inverse est également apparu : certaines femmes auraient accusé des hommes de les avoir touchées afin de recevoir une somme d’argent. Ce thème a d’ailleurs été traité dans un film sorti en 2007 : "Sore de mo, Boku wa Yatte Inai" ("Je n’ai pas fait ça") basé sur l’histoire vraie d’un jeune homme innocent accusé d’attouchements sur une étudiante dans un train. D’ailleurs, certains hommes demandent des wagons réservés aux messieurs afin de ne pas être accusés à tort et d'autres s'offusquent que tous les hommes soient traités comme des "tripoteurs" potentiels. Mais des enquêtes révèlent que la majorité des passagers - femmes et hommes - sont pour ce système de ségrégation.